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Le bugle
Appelé flugelhorn en anglais, le bugle est apparu vers 1850. Les coudes de l'instrument sont moins prononcés que ceux d'une trompette mais la principale différence avec cette dernière est sa perce conique sur la majeure partie de sa longueur (hormis les coulisses des pistons) et le fait que les pistons sont placés près de l'embouchure. Il en résulte une réponse facile et rapide, et un son très doux, velouté, jamais cuivré. Du fait de sa forme conique, le bugle ne peut jouer aussi haut que la trompette dans l'extrême aigu ; c'est dans le grave et le médium qu'il déploie ses qualités sonores. Il est réputé plus facile à jouer que la trompette. Dans le jazz, la douceur de son timbre en fait le véhicule privilégié des ballades et l'instrument de prédilection des mélodistes. Les trompettistes qui « doublent » au bugle sont légion.
Joe Bishop (également tubiste et arrangeur) serait le premier à avoir introduit le bugle dans l'orchestre d'Isham Jones (1932) puis popularisé dans celui de Woody Herman (1936). Mais ce n'est qu'au début des années 1950 que les solistes l'ont véritablement adopté, à l'instar de Shorty Rogers, Kenny Barker, Clark Terry et même Miles Davis (le temps de l'album Miles Ahead arrangé par Gil Evans). Après eux, Art Farmer, Franco Ambrosetti et Tom Harrell ont écrit une large partie de leur œuvre sur cet instrument. Depuis les années 1970, le bugle s'est suffisamment popularisé dans les rangs des trompettistes pour que les arrangeurs en tiennent compte et l'utilisent comme une couleur supplémentaire dans leurs orchestrations.
Le cornet à pistons
Inventé en 1831, le cornet se présente sous deux types : le cornet dit « anglais » ou « style anglais à crosse » (bien qu'inventé en France), de forme ramassée, et le « cornet-trompette » ou cornet « américain », dont le tube semble plus long. En réalité, les deux instruments sont de longueur identique. Au plan de la sonorité, le cornet anglais se rapproche du bugle tandis que le cornet américain est plus proche de la trompette. Joués avec la même embouchure, toutefois, on aura du mal à les distinguer. Plus facile d'abord, d'une attaque plus directe, le cornet s'est diffusé en permettant un jeu rapide et souple, ce qui en a fait l'un des instruments de choix des harmonies ou des brass bands. Il ne s'est, cependant, jamais imposé dans l'orchestre symphonique. À la fin du XIXe siècle, il est devenu l'instrument familier des fanfares de La Nouvelle-Orléans (certains historiens ont fait remarquer qu'à l'issue de la guerre de Sécession puis de la guerre hispano-américaine de Cuba en 1898, un grand nombre d'instruments issus des harmonies militaires avait été écoulés sur les marchés de la cité louisianaise).
Simple d'apprentissage et de maniement, le cornet fut l'instrument des premiers jazzmen noirs, tels que Buddy Bolden, Buddy Petit, Emmett Hardy, Freddie Keppard et King Oliver. C'est par le cornet qu'au Waif's Home, on initia Louis Armstrong à la musique. Il est notable que la trompette supplante le cornet au milieu des années 1920, quand se répandent aux États-Unis les premières trompettes de facture américaine de qualité (Conn a produit son premier modèle en 1910, Bach en 1924), qui offrent une dynamique de jeu supérieure et, surtout, permettent d'utiliser l'octave au-dessus du contre-ut, alors que le cornet, comme le bugle, est limité dans l'extrême aigu du fait de sa perce conique. Le cornet ne disparaît pas totalement cependant des mains des jazzmen. Bix Beiderbecke, Rex Stewart, Wild Bill Davison, Bobby Hackett et Ruby Braff restèrent des adeptes de l'instrument jusqu'à leur disparition. Plus récemment, Nat Adderley, Bobby Bradford, Olu Dara et Graham Haynes ont aussi fait le choix de cet instrument devenu désormais marginal.
Auteur : Vincent Bessières