Page découverte
Les instruments de musique en Thaïlande
La Thaïlande dispose d’un patrimoine d’instruments de musique et d’orchestres d’une grande diversité. Il existe de plus de nombreuses particularités stylistiques régionales appliquées aux genres musicaux joués dans tous le pays. Plusieurs instruments traditionnels thaïlandais sont caractéristiques de cette partie du monde et se retrouvent également dans les pays voisins. Parmi ceux-ci se trouvent les xylophones à lames de bambou suspendues au-dessus d’une caisse de résonance unique et l’emploi de gongs métalliques dont la facture comporte une protubérance centrale. Ces instruments figurent notamment dans les orchestres de musique de piphat et mahori.
Le piphat
Des descriptions de cet orchestre se trouvent dans des récits de voyageurs à partir du XVIIe siècle, soit durant la période d’Ayutthaya. Cette musique fut autrefois l’apanage de la cour royale et des visiteurs étrangers de hauts rangs. En effet, le piphat accompagnait le roi dans son quotidien, présidant aux cérémonies royales et religieuses, et soutenait les représentations de théâtres classiques. Son importance à la cour devint obsolète avec l’abandon de la monarchie absolue au début du XXe siècle. Hors du palais royal, cette musique se maintint et s’épanouit dans des contextes liés aux arts du spectacle. En effet, cet orchestre est nécessaire à la performance de formes de théâtres dansés (khon et lakhon), de marionnettes, ainsi que lors des déclamations de récits épiques. Bien que la musique de piphat soit régulièrement délaissée au profit de musiques pop contemporaines et, dans les campagnes, des musiques traditionnelles populaires, elle est toujours considérée comme représentative de l’identité culturelle thaïe.
L’orchestre de piphat existe sous différentes tailles, mais toutes se composent d’idiophonesLe son est obtenu en frappant le corps solide de l’instrument., d’un ou plusieurs aérophonesInstruments dont le son est obtenu par la mise en vibration d’une colonne d’air. C’est le cas des flûtes, hautbois, sifflets, etc., et de membranophonesInstruments dont le son est obtenu par mise en vibration d’une membrane. C’est le cas notamment des tambours à peaux. En signe de respect, les musiciens n’enjambent jamais les instruments posés sur le sol.
Parmi les instruments mélodiques de l’orchestre, on trouve un ou plusieurs xylophones à lames de bois ou de métal : les ranat. Le ranat ek est l’instrument directeur de l’orchestre et figure dans toutes les instrumentations de piphat. On le reconnaît à son pied central. D’autres xylophones viennent s’ajouter dans des orchestres plus larges.
Les khawng wong yai et khawng wong lek sont des carillons de petits gongs de métal bosselés disposés sur un cadre de rotin circulaire posé à même le sol. Le musicien s’assoit au milieu du cercle et frappe la protubérance centrale du gong à l’aide de deux mailloches.
Le dernier instrument mélodique de cet orchestre est le hautbois pi nai. Cet instrument à anche dite « quadruple » produit un son nasillard très caractéristique.
L’assise rythmique est également constituée de plusieurs instruments. La paire de tambours à deux peaux en forme de barrique klawng that est spécifique au piphat et produit un son grave et puissant qui sied particulièrement aux représentations théâtrales. L’instrument est maintenu à l’oblique et le musicien frappe la peau supérieure à l’aide de mailloches tandis que la peau inférieure vibre par résonance.
Le taphon est un tambour considéré comme étant sacré et fait l’objet de multiples attentions : des offrandes lui sont régulièrement faites et il est rangé dans un endroit propre. Constitué de deux peaux de tailles différentes, il est placé horizontalement afin que chacune des peaux puisse être frappée par une main. Les multiples frappes dont dispose le musicien produisent autant de sons différents.
Le dernier élément de cet orchestre est une paire de cymbalettes de bronze reliées par un fil : les ching. Ce petit instrument se joue en alternant régulièrement des coups faisant résonner le son et d’autres l’étouffantLe premier est dit « ouvert » et s’obtient en faisant glisser l’une des cymbalettes sur le bord de l’autre. Le second est dit « fermé » et s’obtient en plaquant les deux cymbalettes l’une sur l’autre..
Dans les représentations de théâtres accompagnées de musique de piphat, les danseurs et marionnettes s’animent au son de la musique tandis que des chants racontent l’histoire mise en scène. Toutefois, musique et chant ne jouent pas en même temps. Ils alternent constamment au fur et à mesure que se déploie la trame de l’histoireLors des chants poétiques, seuls un ou deux instruments à percussion ponctuent discrètement la récitation..
Le mahori
L’orchestre de musique de mahori fut longtemps le comparse du piphat dans la vie musicale à la cour royale. Cette musique est essentiellement liée au divertissement et se joue pour le plaisir de l’écoute. Elle est à présent également employée pour accompagner une forme de théâtre. Le mahori se caractérise par l’emploi d’un nombre important de cordophonesinstrument dont le son est obtenu par la mise en vibration de cordes. Les xylophones à lames de bambou et de métal, les carillons de gongs, et la paire de cymbalettes métalliques présents dans le piphat se retrouvent également dans cet orchestre. L’instrumentation est complétée par des aérophones et une paire de tamboursun petit tambour en forme de gobelet et un tambour sur cadre.
Musiques et chants populaires
Les danses et les célébrations populaires accompagnées de musique traditionnelle demeurent vivantes, notamment en milieu rural. Ces répertoires se distinguent nettement des musiques associées à la cour par leurs contextes de jeu liés au calendrier, à des rites de passages marquant la vie de chaque individu, ou à des événements privés spécifiques. Une tradition de chansons populaires a capella ou accompagnées d’instruments à percussions rudimentaires est un art très populaire. Hommes et femmes alternent pour traiter de tous sujets, allant des poèmes énoncés en langage raffiné aux traits d’humour les plus grivois.
Auteure : Stéphanie Khoury