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Italia, Rhapsodie pour orchestre op. 11 Alfredo Casella
Carte d’identité de l’œuvre : Italia, Rhapsodie pour orchestre op. 11 d’Alfredo Casella |
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Genre | musique symphonique |
Composition | en 1909 dans la région du Piémont |
Création | le 23 avril 1910 à la salle Gaveau, à Paris |
Forme | rhapsodie en un seul mouvement |
Instrumentation | bois : 1 piccolo (également 3e flûte), 2 flûtes, 3 hautbois, 1 cor anglais, 1 petite clarinette, 2 clarinettes, 1 clarinette basse, 3 bassons, 1 contrebasson cuivres : 4 cors, 4 trompettes, 3 trombones, 1 tuba percussions : timbales, glockenspiel, tambour militaire, tambourin, triangle, tam-tam, cymbales, grosse caisse avec cymbales attachées, 1 cloche cordes pincées : 2 harpes cordes frottées : violons 1 et 2, altos, violoncelles |
Contexte de composition et de création
Alfredo Casella a vingt-six ans lorsqu’il compose sa rhapsodieune pièce symphonique de forme libre qui a traditionnellement pour matériau de base des thèmes et rythmes nationaux ou régionaux. Est-ce parce qu’il a vécu presque toute son enfance loin de son pays qu’il défend si âprement la musique nationale comme il le fera toute sa vie ? Influencé par les compositeurs nationalistes russes et espagnols, il revisite le matériau populaire italien dans une œuvre qu’il veut architecturalement monumentale, et souhaite créer un style national.
Lorsqu’il cherche à faire éditer Italia, Casella essuie des refus à Paris. Il se tourne alors vers Gustav Mahler qui le fait éditer par le viennois Universal. Pour le remercier, Casella dirige sa Symphonie n° 2 à Paris. Un mois plus tard, il dirige Italia salle Gaveau, devant un public et une critique enthousiastes.
L’œuvre : caractéristiques et thèmes principaux
1re partie : description de la vie en Sicile, tragique et superstitieuse, marquée par un quotidien parfois difficile
Le premier air, tragique, est joué par les cordes. Lent et lourd, il est ponctué d’un coup féroce de cymbales, de caisse claire et de timbales, et incarne la passion. Le drame est sous-jacent. Casella s’est inspiré d’un air recueilliComme tous les thèmes siciliens qui apparaissent dans cette rhapsodie, il a été recueilli par l’ethnomusicologue et compositeur Ernesto Favara et publié dans Canti della terra e del mare di Sicilia. dans le village de Vallelunga, au centre de la Sicile : l’imprécation d’un amant à sa maîtresse. La suite se poursuit dans le même esprit déclamatoire.
Alors que les cordes installent une ambiance fébrile en jouant sul ponticellopresque sur le chevalet, ce qui produit un son plus mince et aigu, sur un lointain roulement de grosse caisse s’élève un chant des mineurs, telle une lamentation. L’extraction du soufre était alors une activité majeure de la région. Les bois (flûtes, cor anglais, clarinette, bassons) font ressentir, dans un registre grave et un tempo lent, la dure condition des mineurs.
Après un bref retour du premier thème, un troisième air émerge délicatement. Profondément marqué par la religion, le pays entier célèbre pieusement le vendredi saint. Casella fait jouer au cor anglaisgrand hautbois, au son doux et mélancolique, dont le pavillon est en forme de poire un chant entendu lors d’une procession. Sa sonorité lointaine, douce et libre, s’installe sur un discret roulement de timbale et un tapis sonore de cordes aux phrases étirées, jalonnées çà et là du tintement de la cloche.
On change ensuite d’atmosphère avec l’arrivée d’un quatrième thème. Dans le quartier populaire du port de Trapani, à l’ouest de l’île, des femmes frappent la fibre des câbles d’amarrage des bateaux sur des blocs de marbre. Leur chant, joué tout d’abord au basson, est accompagné par la douceur des deux harpes. Sur cette mélodie rythmée et entraînante, on les imagine esquissant quelques pas de danse. Cette période contraste avec les précédentes par sa vivacité.
Pour clore cette première partie, la séquence initiale grave et dramatique revient à la clarinette.
2e partie : description de la joie de vivre et de l’esprit de fête qui règnent à Naples
L’incontournable chanson napolitaine Funiculì Funiculà, jouée aux violoncelles et altos, pétille joyeusement, accompagnée par un rythme de croches réparties parmi les autres instruments de l’orchestre. Bientôt le foisonnement des percussions, les glissandi des harpes et les trillesbattement rapide entre deux notes voisines des bois entraînent l’auditeur dans une fête exubérante. Cette chanson d’amour, qui a pour cadre le récent funiculaire construit pour gravir le Vésuve, écrite en 1888 par Luigi Denza, est l’une des plus populaires d’Italie.
Tout aussi dynamique, une seconde chanson napolitaine, LariulàComposée par Mario Costa en 1888, elle met en scène deux jeunes amoureux., est jouée aux violons et trompettes.
Elle alterne avec une troisième chanson napolitaine de la même veine, A marechiare, de Francesco Paolo Tosti, jouée aux bois sur fond de cordes en pizzicatoLes cordes sont pincées avec les doigts.
Un jeu s’instaure entre ces deux airs qui se répondent avec malice. L’œuvre se termine dans une grande jubilation.
Auteure : Sylvia Avrand-Margot