Exposition du 13 octobre 2017 au 28 janvier 2018 - Philharmonie de Paris
Introduction
Barbara, une dame brune de noir vêtue, une silhouette longiligne qui égrène ses amours et sa mélancolie : vingt ans après sa disparition,dresser son portrait implique de dépasser le cliché en noir et blanc qui en a fait une icône. L’exposition propose littéralement de passer derrière le rideau et dévoiler l’extraordinaire richesse de l’artiste : une femme vibrante et lumineuse, pour qui le spectacle était la vie, et la scène de théâtre, le décor de son quotidien.
Barbara l’aventurière n’a cessé de se réinventer. De ses débuts en Belgique aux cabarets de la Rive gauche, elle s’est imposée comme chanteuse, puis créatrice complète, conquérant ensuite toutes les grandes scènes parisiennes, portée en triomphe par un public amoureux. Parce qu’elle affrontait sa vulnérabilité sans pudeur, affichait ses opinions sans hypocrisie, séduisait sans détour et osait vivre en nomade, son nom reste aujourd’hui plus que jamais synonyme de liberté.
Il ne faut jamais revenir Au temps caché des souvenirs Du temps béni de son enfance.
De son vrai nom Monique Serf, Barbara est née le 9 juin 1930, dans le quartier des Batignolles à Paris. Très tôt, la jeune Monique souhaite devenir « pianiste chantante ». Son rêve est contrarié par une enfance chaotique.
Les déboires professionnels de son père puis la guerre jettent la famille sur les routes. Monique, petite fille juive, est souvent séparée des siens. Une longue errance jusqu’au retour à Paris en 1945 et la rencontre décisive avec Madame Thomas-Dusséqué, sa professeur de chant. Barbara a trouvé sa voie : celle de la chanson.
Quand on la questionnait sur cette période, Barbara balayait d’un revers de la main toute allusion ou confidence.
Bruxelles
Je n’avais plus peur de rien. J’aurais traversé les murs, animée par mon désir obsessionnel, par ma certitude de chanter un jour.
En 1949, le père quitte définitivement le domicile rue de Vitruve. Le jour où les huissiers saisissent le piano, Barbara, désespérée, fugue pour la Belgique. A vingt ans, elle vit de nouveau l’exode, la fuite. Brièvement de retour à Paris en 1951, elle est plongeuse au cabaret des frères Prévert, La Fontaine des Quatre Saisons. Elle auditionne au cabaret L’Écluse, sans succès. Déterminée à devenir une « femme qui chante », elle retourne à Bruxelles, affronte la pauvreté mais impose sa diction travaillée et son allure gironde. Elle fait la connaissance d’un jeune avocat prestidigitateur, Claude Sluys et d’une pianiste géorgienne Ethery Rouchadzé. Ensemble, ils ouvrent le cabaret Le Cheval Blanc. Monique Serf devient alors Barbara.
Mes chansons elles naissent avec la vie […] c’est uniquement des choses que j’ai vécues, qu’on a tous vécues.
En 1963, au Théâtre des Capucines, Barbara bouleverse le public avec un titre inédit, Nantes. C’est la révélation. Elle signe un contrat avec la maison de disques Philips. En 1964, Georges Brassens lui propose la première partie de son spectacle à Bobino. Elle y revient en tête d’affiche en 1965 et 1966, consacrant sa « plus belle histoire d’amour » avec le public. Les roses inondent la scène du music-hall, les rappels n’en finissent pas. Barbara devient la grande dame de la chanson française.
Chez elle rue Rémusat, elle écrit sans relâche ce qu’elle nomme « ses petits zinzins ». Elle compose souvent la nuit sur son piano et s’enregistre au magnétophone. Ses mots simples jaillissent comme des confessions. Barbara, la grande amoureuse, écrit comme jamais une femme ne l’avait fait avant elle.
Les folles années
Touche pas mon piano Touche pas mes remparts Touche pas mes lunettes Touche pas mon regard
Barbara se produit sur scène près de trois cents jours par an. Elle aime cette vie de forain et s’entoure d’une troupe fidèle : son chauffeur, qui est aussi son sonorisateur, ses assistantes successives et son manager. Chaque concert déploie le même cérémonial où se mêlent croyances, discipline et exigence. La chanteuse prend possession du théâtre tôt le matin : Je tenais à me préserver de toutes les émotions venues de l’extérieur. Elle surveille la qualité du piano mis à sa disposition, la hauteur du tabouret, les lumières, la température de la salle, puis s’enferme dans sa loge jusqu’au lever de rideau.
Qu’on ne m’ordonne pas, je suis reine en mon île Je suis femme en mon lit, je suis folle en vos villes Et j’ai choisi mes hommes, j’ai bâti mes empires Au diable la raison et vivent mes délires
Barbara se montre également tentée par le cinéma, d’abord motivée par ses amitiés. Franz, premier film réalisé par Jacques Brel, constitue sa première expérience cinématographique. Puis elle interprète une cantatrice déchue dans L’Oiseau rare de son ami Jean- Claude Brialy, en 1972. Elle fait une dernière incursion devant la caméra du chorégraphe Maurice Béjart pour Je suis né à Venise en 1976. Barbara participe aussi aux émissions de variétés de Maritie et Gilbert Carpentier et prend plaisir à chanter avec Johnny Hallyday, Claude Nougaro, Julien Clerc…
Précy
Précy Oh, jardin de Précy Précy Oh, que j’aime tes soirs de mélancolie
En 1973, Barbara change de vie : à quarante kilomètres de Paris, à Précy-sur-Marne, elle découvre une vieille ferme aux murs épais qui encadre un jardin fleuri. Elle s’y installe au printemps et ne quittera plus cette maison. Précy est un refuge et aussi un lieu de création pour écrire et répéter ses spectacles. Ses collaborateurs s’y retrouvent une journée, une semaine, voire une année comme le jeune François Wertheimer, qu’elle installe à demeure pour écrire avec elle le disque La Louve, sorti en 1973.
Pantin espoir, Pantin Bonheur Oh, qu’est-ce que vous m’avez fait là ? Pantin qui rit, Pantin, j’en pleure, Pantin, on recommencera !
Du 28 octobre au 21 novembre 1981, Barbara transforme un chapiteau de cirque à la Porte de Pantin en salle de spectacle où se pressent plus de deux mille personnes chaque soir. La salle est aménagée par ses soins : rideaux de velours et moquette rouges réchauffent le chapiteau. Barbara impose un prix des places modéré. Cette série de concerts la fait définitivement basculer dans la légende : la chanteuse quitte son piano, se mue en bête de scène, hypnotise son public. Dès lors, ses apparitions sur scène deviennent des évènements.
Les concerts mythiques
Les concerts au Châtelet en 1987 puis en 1993, à Mogador en 1990, sont de véritables messes où se pressent des milliers de personnes. Barbara sillonne la France avec deux semi-remorques, et remporte partout le même triomphe. Cependant ses problèmes de voix se sont accentués en quelques années. Chaque concert impose un suivi méticuleux de ses cordes vocales par un phoniatre. Le 3 décembre 1993, une pneumonie l’oblige à interrompre les concerts au Châtelet, et Barbara quitte définitivement la scène, le 26 mars 1994 à Tours.
Crédits de l’exposition
Commissaire : Clémentine Deroudille
Scénographes : Antoine Fontaine et Christian Marti assistés de Perrine Villemur
Graphisme : Studio B49, Mateo Baronnet
Éclairage : Philippe Collet Conseiller scientifique : Jean-François Fontana
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Le Musée de la musique propose des expositions multimédias, à partir de projets réalisés à Paris, qui peuvent être présentées dans des lieux non-muséaux (médiathèques, centre culturels, salles de concert…) en France comme à l’étranger.