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Jeux d’enfants Georges Bizet
Carte d’identité de l’œuvre : Jeux d’enfants de Georges Bizet |
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Genre | musique de chambre |
Composition | en 1871 |
Dédicataires | Marguerite de Beaulieu et Fanny Goüin |
Forme | 12 pièces : 1. L’Escarpolette 2. La Toupie 3. La Poupée 4. Les Chevaux de bois 5. Le Volant 6. Trompette et tambour 7. Les Bulles de savon 8. Les Quatre Coins 9. Colin-Maillard 10. Saute-mouton 11. Petit Mari, petite femme 12. Le Bal |
Instrumentation | piano à quatre mains |
Petite suite, orchestration de Georges Bizet | |
Genre | musique symphonique |
Orchestration | en 1872 |
Création | le 2 mars 1873 au théâtre de l’Odéon, à Paris |
Forme | 5 pièces d’après les Jeux d’enfants : 1. Marche (Trompette et tambour) 2. Berceuse (La Poupée ) 3. Impromptu (La Toupie) 4. Duo (Petit Mari, petite femme) 5. Galop (Le Bal) |
Instrumentation | bois : 1 piccolo, 2 flûtes, 2 hautbois, 2 clarinettes, 2 bassons cuivres : 4 cors, 2 trompettes percussions : timbales, cymbales, grosse caisse, triangle cordes : violons 1 et 2, altos, violoncelles, contrebasses |
Des pièces pour piano à la suite pour orchestre
La Petite suite pour orchestre est tirée des Jeux d’enfants, douze pièces pour piano à quatre mains que Georges Bizet a composées à l’automne de 1871. C’est sans doute parce qu’il savait qu’il allait devenir père dans les mois suivants qu’il a entrepris d’écrire ces morceaux. En effet, en juillet 1872, naît le petit Jacques, que Bizet ne connaîtra presque pas puisqu’il décédera en juin 1875, peu avant le troisième anniversaire de son fils. Ce recueil de pièces pour piano est l’un des premiers du genre en France. Après Bizet, d’autres compositeurs importants s’inspireront de l’enfance à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle : Fauré avec Dolly pour piano à quatre mains (1898), Debussy avec Children’s Corner pour piano (1908), Ravel avec Ma Mère l’Oye pour piano à quatre mains (1910). Mais Bizet, admirateur de la musique allemande, a eu aussi un prédécesseur en ce domaine de l’autre côté du Rhin en la personne de Robert Schumann, auteur des célèbres Scènes d’enfants pour piano (1838). Tout comme Ravel qui orchestrera Ma Mère l’Oye, Bizet retient cinq pièces de ses Jeux d’enfants et en réalise une orchestration en 1872, dans laquelle il déploie un véritable talent d’orfèvre. Avec un soin particulier, il fait dialoguer les instruments entre eux, les unit ou les oppose, créant ainsi des couleurs diverses et raffinées. Cette seconde version de l’œuvre est créée en mars 1873 au théâtre de l’Odéon, sous la direction du jeune chef d’orchestre Édouard Colonne.
Petit aperçu de la suite pour orchestre
Marche. Deux instruments sont mis en valeur dans cette première pièce : le tambour, dont on entend les roulements du début à la fin, et la trompette, dont les appels résonnent souvent au cours de la pièce. Ce morceau s’intitulait justement, dans le recueil pour piano, Trompette et tambour. Cette pièce se compose de trois parties : une introduction en catimini, en ut mineur, suivie d’un thème de marche aux bois, qui évoque plutôt des soldats de plomb que des guerriers assoiffés de sang. Puis vient un passage plus mouvementé, avec notes détachées, triolets menaçants et exclamations de l’orchestre. Enfin, le morceau s’achève avec le retour du thème de marche et une conclusion apaisée en ut majeur.
Berceuse. Un seul thème compose cette pièce, repris inlassablement pour endormir le petit enfant : il est exposé dès le début par les violons, soutenus par le doux contre-chant des violoncelles. L’organisation de cette pièce est simple : les deux premières sections font entendre le thème d’abord aux cordes, puis confié à d’autres instruments, et se terminent sur un accord suspensif de tout l’orchestre. Enfin, dans une troisième section, le thème de la berceuse réapparaît, mais se transforme et s’efface peu à peu, avant de résonner une dernière fois, aérien et délicat, à la flûte seule : l’enfant s’est endormi.
Impromptu. Ce bref morceau, intitulé La Toupie dans le recueil pour piano, est écrit dans un mouvement rapide et enlevé. Sur des oscillations de doubles croches aux altos, la flûte dessine un motif en petites notes piquées, auquel font écho les pizzicatos des cordes. La toupie vacille et tombe une première fois, puis l’enfant la relance : le thème est repris par tous les bois, avant que la toupie de ne s’arrête de nouveau. Enfin, la pièce se termine par une brève coda en triolets et un accord fortissimo qui met fin aux tournoiements du petit jouet.
Duo. Ce duo correspond à la pièce Petit Mari, petite femme du recueil pour piano. Dans ce morceau, qui fait uniquement intervenir les cordes, Bizet a voulu suggérer les jeux enfantins et les premiers émois amoureux en écrivant un air lyrique, d’une passion un peu naïve et d’un enthousiasme ingénu. Deux instruments dialoguent et se répondent : le violon, représentant la femme, et le violoncelle, représentant le mari. Les lignes mélodiques confiées à ces deux instruments s’entremêlent tout au long de la pièce, avant de se rejoindre dans une conclusion remplie de délicatesse et de douceur.
Galop. Pour le final de sa suite, Bizet a utilisé Le Bal, dernière pièce de son recueil, qui fait référence à l’une des danses les plus en vogue au XIXe siècle. Le galop est une danse rapide et échevelée, qu’on exécutait à la fin d’un bal ou d’une fête, et à laquelle chacun participait comme il pouvait. Bizet nous offre ainsi une conclusion gaie et entraînante, grâce à un thème énergique énoncé aux violons puis repris par tout l’orchestre. Dans les dernières mesures, le mouvement s’accélère, le rythme s’emballe, les pas sont moins assurés. Enfin, le tout se termine sur un grand accord tenu, dans l’effervescence la plus complète.
Auteur : Christophe Corbier