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Les Contes d’Hoffmann Jacques Offenbach
Carte d’identité de l’œuvre : Les Contes d’Hoffmann de Jacques Offenbach |
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Genre | opéra : opéra-comique |
Librettiste | Jules Barbier, d’après les histoires fantastiques de Ernest Theodor Amadeus Hoffmann |
Composition | entre 1876 et 1880 |
Création | le 10 février 1881 à l’Opéra Comique, à Paris |
Forme | opéra en cinq actes |
Instrumentation | bois : 2 flûtes, 2 hautbois, 2 clarinettes, 2 bassons cuivres : 4 cors, 2 cornets à pistons, 3 trombones percussions : triangle, timbales, grosse caisse, cymbales cordes pincées : 1 harpe cordes frottées : violons, altos, violoncelles, contrebasses |
Genèse
Le livret des Contes d’Hoffmann s’inspire des histoires fantastiques du célèbre écrivain romantique allemand Ernest Theodor Amadeus Hoffmann. Dans un premier temps, l’ouvrage est destiné à l’Opéra Comique : comme le veut la tradition de cette salle, il devra comporter des dialogues parlés auxquels Offenbach envisage déjà de substituer des récitatifs en vue de futures représentations à Vienne et ailleurs.
Un changement de direction de l’institution oblige le compositeur à confier la création des Contes d’Hoffmann au Théâtre Lyrique, puis à la Gaîté qui finalement ferme ses portes pour cause de faillite en 1878. L’œuvre est donc à nouveau destinée à l’Opéra Comique et, selon les volontés de son directeur, Offenbach transpose, rectifie et réécrit de nombreuses pages.
En septembre 1880 commencent les répétitions, et l’œuvre subit encore quelques changements. Mais dans la nuit du 4 au 5 octobre 1880, Offenbach meurt. L’opéra sera complété et terminé par le compositeur français Ernest Guiraud (1837-1892).
Résumé
À Munich, dans la taverne à vins de Luther – là où débute et finit l’opéra – le poète Hoffmann fait son entrée, aux côtés de son confident Nicklausse. Ils viennent d’assister au premier acte de Don Giovanni, célèbre opéra de Mozart. Pendant que les deux compères s’extasient devant la beauté de Stella, la diva de la soirée qu’Hoffmann a autrefois aimée, le conseiller Lindorf complote dans le dos du jeune homme. Il vient en effet d’intercepter un message destiné à Hoffmann dans lequel la cantatrice l’invite à le rejoindre dans sa chambre le soir-même.
Désabusé et excédé par le comportement de Lindorf qui le suit partout comme une mauvaise ombre, Hoffmann entame le récit de ses trois amours malheureux. Dans ces contes fantastiques, Lindorf joue un rôle crucial à chaque fois, vêtu de trois costumes différents, tous plus diaboliques les uns que les autres. Ainsi, dans la passion folle d’Hoffmann pour la poupée Olympia, Lindorf devient Coppélius, camelot brisant net le rêve impossible du poète. Face à la cantatrice Antonia, il est le docteur Miracle, charlatan maléfique dont les conseils vont foudroyer la jeune fille et tuer l’amour éperdu d’Hoffmann pour elle. À Venise enfin, Lindorf devient le capitaine Dapertutto, magicien manœuvrant la courtisane Giulietta – objet des désirs d’Hoffmann – pour qu’elle obtienne de lui son reflet, donc son âme. Mais Giulietta fuit, et la jalousie et le crime se mêlent à cette histoire sordide et funeste.
Olympia, Antonia et Giulietta ne sont en réalité que trois facettes de Stella, la cantatrice.
Les personnages principaux et leur voix
- Hoffmann, poète, ténor
- Olympia, poupée mécanique, soprano
- Antonia, jeune fille, soprano
- Giulietta, courtisane, soprano
- Stella, cantatrice, soprano
- Le conseiller Lindorf, baryton-basse
- Coppélius, opticien, baryton-basse
- Le docteur Miracle, baryton-basse
- Le capitaine Dapertutto, baryton-basse
- Nicklausse / La Muse, mezzo-soprano
- La Voix de la tombe, fantôme de la mère d’Antonia, mezzo-soprano
Air caractéristique
Un des extraits les plus célèbres de cet opéra fantastique est la Barcarolle « Belle nuit, ô nuit d’amour », duo écrit pour soprano et contralto. Cet air, chanté par Giulietta et Nicklausse, intervient lors du 3e acte. À l’origine, la barcarolle illustre le chant des gondoliers vénitiens, dont le mouvement caractéristique de la barque a donné le nom à cette forme musicale.
Focus : trio « Ta mère ? Oses-tu l’invoquer ? » (Antonia, Miracle, La Voix)
Ce trio clôt le 3e acte « Antonia ». Il réunit le docteur Miracle, La Voix (fantôme de la mère d’Antonia) et Antonia. Musicalement, cette pièce est trépidante et apporte une certaine tension. Le rôle de chaque personnage et son rendu musical sont symptomatiques de l’issue fatale de l’acte.
Miracle incite Antonia à chanter alors qu’elle est gravement malade et qu’elle a promis à Hoffmann d’arrêter. Miracle déclame et psalmodie ses phrases comme un stentor venu d’outre-tombe :
La Voix, alias le fantôme de la mère, apparaît lorsqu’Antonia l’invoque dans ses souvenirs. Elle l’appelle puis entonne une chanson, proche de la berceuse, qu’elle reprendra comme motif constitutif de ses interventions :
Antonia est complètement dépassée par la tournure que prend cette « conversation » avec une voix venue d’ailleurs et celle d’outre-tombe du docteur… Au fil de ses interventions, elle panique, jusqu’à finir par tomber inconsciente et mourir. Musicalement, une tension dramatique s’installe, renforcée par des motifs musicaux de plus en plus aigus et tendus :
1re réaction :
L’ambitus s’élargit :
Antonia entend sa mère par les pouvoirs manipulateurs du docteur. Une place importante est laissée aux silences afin de théâtraliser sa réaction.
Les interventions d’Antonia sont de plus en plus virtuoses par l’emploi des mélismes et l’explosion de l’ambitus dans les aigus. On observe la superposition du motif « berceuse » de la mère et les imprécations incessantes du docteur.
Antonia s’agite, ce dont témoigne l’écriture rythmique de ce passage (duolets).
Le final n’est pas sans rappeler la scène ultime de Don Giovanni de Mozart : tel le valet Leporello devant la statue de pierre du Commandeur, Antonia est pétrifiée en entendant la voix de sa mère. Elle finit sur un contre-utdo plus aigu d’une octave que le do le plus aigu du registre habituel qui signe sa mort. Les autres personnages perdent leur magie et disparaissent.
L’orchestre, quant à lui, théâtralise tout au long de la pièce les interventions des personnages par des accords cinglants joués forte et en homorythmie. L’utilisation du silence est particulièrement prégnante dans cet extrait.
Auteure : Anne Thunière